PARIS | La liquidation annoncée jeudi des magasins Toys’R’Us aux États-Unis illustre la fragilité d’un secteur du jouet attractif mais très concurrentiel, où la guerre entre spécialistes, généralistes et commerce en ligne fait rage.
Ce coup de tonnerre pour une enseigne emblématique a retenti seulement deux jours après que le propriétaire de l’enseigne française concurrente La Grande Récré, lui aussi perclus de dettes, eut été placé en redressement judiciaire.
Selon une étude récente du cabinet Xerfi, les boutiques de jouets évoluent dans un « contexte de concurrence accrue », en particulier de la part des géants d’internet.
En outre, les grandes surfaces alimentaires restent un « circuit incontournable pour bon nombre de ménages », en particulier pour les achats de Noël, tandis que l’acquisition de produits de seconde main, via des sites comme LeBonCoin ou eBay rencontre également un succès croissant, note Xerfi.
En 2017, rien qu’en France, le marché du jouet pesait 3,4 milliards d’euros, selon le cabinet NPD. Et même s’il a affiché un léger repli (-0,8%), il restait sur quatre années de croissance consécutive, confirmant sa position de secteur attractif.
La part de marché du commerce en ligne dans les jouets atteignait 26% fin septembre en France, comparable à celle des États-Unis (24% en 2017) selon NPD, une proportion toujours grandissante.
Pas les mêmes armes
L’annonce de la prochaine liquidation des 735 magasins américains de Toys’R’Us n’a donc pas surpris Franck Mathais, porte-parole de son concurrent JouéClub et expert du secteur.
« On s’y attendait, la marque se trouvait depuis plusieurs années face à une double difficulté: financière et concurrentielle », explique-t-il à l’AFP. Toys’R’Us s’était placé dès septembre dernier sous la protection de la loi américaine sur les faillites.
Entre des supermarchés (comme Walmart aux États-Unis) très agressifs sur les prix et la montée du commerce en ligne, synonyme de pression sur les marges, un spécialiste ne peut se battre avec les mêmes armes que ses concurrents pour lesquels la part du jouet est infime dans le chiffre d’affaires total.
« Or, sans marge de manoeuvre, l’entreprise devient trop fragile, d’autant plus que sa dette est importante et sa trésorerie faible, et qu’on lui demande d’investir dans le numérique en même temps: petit à petit, l’étau se resserre et la situation ne devient plus vivable », explique M. Mathais.
Repenser le modèle
Cette disparition d’une enseigne spécialisée aux États-Unis n’est pas une bonne nouvelle pour les fabricants de jouets. Certes, ils pourront toujours être référencés chez Amazon ou Walmart, mais selon M. Mathais, cela s’effectuera au détriment des « petits » industriels et des consommateurs.
En effet, « chez un généraliste, le rayon jouets, petit, offre peu de choix, et sur internet, c’est le contraire, le nombre de références est tel que le client est obligé de se concentrer sur de grandes marques », un double effet négatif donc sur les « petits » fabricants.
Or, les industriels du jouet ont besoin de « tester » leurs produits toute l’année, pas seulement à Noël. Ils effectuent plus naturellement ces tests chez un spécialiste, l’assortiment et le conseil permettant de se différencier.
Dans un tel contexte, affirme pour sa part à l’AFP le patron de King Jouet, Philippe Gueydon, il est temps que fournisseurs et enseignes « travaillent main dans la main », dans un souci de « repenser le mode de fonctionnement de la filière », avec des « règles du jeu différentes ».
Ils y ont intérêt, estime-t-il, car la disparition du leader mondial du jouet aura forcément un impact pour eux: créances non recouvrées, débouchés réduits...
« Le marché n’est pas en train de se casser la figure », rassure M. Gueydon, même si aux États-Unis, la disparition de Toys’R’Us risque désormais de « livrer le consommateur à lui-même ».
Or, souligne M. Mathais, « n’oublions pas que le jouet n’est pas un produit comme les autres: il a un rôle majeur dans l’épanouissement, le développement et la socialisation d’un enfant ».
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