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Fin de Téo Taxi : que s'est-il donc passé? - ICI.Radio-Canada.ca

Alexandre Taillefer devant quelques taxis Téo.
L'entrepreneur Alexandre Taillefer, fondateur de Téo Taxi, devant quelques taxis Téo. Photo: La Presse canadienne / Ryan Remiorz
Gérald Fillion

La fin des activités de Téo représente un recul dans la modernisation des activités de taxi à Montréal et dans la stratégie de mobilité durable du Québec. Depuis 5 ans, c'est toute une industrie qui est sens dessus dessous. Et il est difficile de comprendre comment on peut en arriver aujourd'hui à ce résultat pitoyable.

Non seulement le projet de Téo Taxi tombe à l’eau, à peine 3 ans plus tard, mais Uber poursuit ses activités dans le cadre d’un projet temporaire qui ne fait pas tout à fait son affaire alors que les chauffeurs de taxi réclament encore une compensation à la juste valeur de leur permis. Ils ne décolèrent pas non plus de voir Uber poursuivre ses activités à Montréal.

Il faut dire que dès le départ de l’aventure Téo, nous savions que ce projet allait coûter cher, allait prendre du temps et exigeait une modernisation des lois du Québec. Le gouvernement Couillard a donné son appui au projet en toute connaissance de cause. Le modèle de Téo avait été étudié en commission parlementaire.

Dans son mémoire, en 2014, déposé à la Commission des transports de l’Assemblée nationale, Téo Taxi écrivait que « pour mieux servir le client, il faut investir massivement dans l’industrie. » Développer des applications mobiles, acheter des véhicules électriques, optimiser le service à l’aide des données recueillies, mettre en place de nouvelles infrastructures, « toutes ces actions requièrent énormément de capital » était-il écrit dans le mémoire.

L’entrepreneur Alexandre Taillefer, fondateur de Téo Taxi, parlait de 275 millions de dollars dans une entrevue à RDI économie en 2014, de 250 millions au lancement en novembre 2015.

Pourquoi les partenaires « tirent la plogue »?

Québec et les grandes institutions financières de l’économie ont injecté des sommes importantes dans l’aventure : près de 10 millions de dollars en subventions du gouvernement du Québec en plus d’un prêt de 5 millions.

Les partenaires que sont la Caisse de dépôt, le Fonds FTQ, Fondaction CSN, la Banque Nationale, Claridge notamment ont aussi investi au fil des années environ 50 millions de dollars, si on se fie aux annonces publiques et aux informations diffusées par plusieurs médias, dont Radio-Canada, La Presse et le Journal de Montréal.

XPND Capital, le fonds de financement de différents projets menés par Alexandre Taillefer, a aussi reçu du financement de ces institutions pour développer la mobilité électrique, soit les activités de Téo Taxi et aussi celles de Lion, qui développe des autobus électriques. Investissement Québec, notamment, a injecté 15 millions de dollars dans XPND.

Il a donc toujours été clair pour tous les partenaires, à commencer par le gouvernement, que l’aventure, qui était celle, ultimement, de moderniser et de transformer l’industrie du taxi à Montréal, allait coûter une fortune et devait se faire sur une certaine période de temps.

Pourquoi donc les partenaires ont-ils décidé de cesser de financer le développement de Téo alors que, dès le départ, on a dit qu’il faudrait « énormément de capital » et que ça allait coûter, aux bas mots, 250 millions de dollars?

Et pourquoi le gouvernement du Québec n’a pas réalisé les ajustements réglementaires nécessaires, beaucoup plus rapidement, pour réussir la modernisation de l’industrie, avec des compensations pour les chauffeurs d’une part, mais aussi des règles comparables pour Uber et le reste de l’industrie?

Dans la mesure où Québec choisit de ne pas exclure Uber, de lui laisser occuper légalement la place que l’entreprise occupe déjà, pourquoi ne pas « égaliser » les règles du jeu? Aujourd’hui, le PDG de Taxelco Dominic Bécotte a dit que le ministre des Transports François Bonnardel avait l’intention de mettre de l’ordre dans tout cela, de donner à tous les acteurs du milieu les mêmes règles. C’est à voir. Pour l’instant, nous n’en savons rien.

Un modèle exigeant : on le savait!

Par ailleurs, il est vrai que le modèle d’affaires de Téo est plus exigeant que celui des taxis conventionnels. Mais, on le savait dès le départ! En achetant de nouveaux véhicules, en payant à l’heure les employés, en louant les permis, c’est l’entreprise Téo qui assumait tous les risques. Comme chauffeur, syndiqué depuis octobre dernier par ailleurs, vous étiez payé qu’il y ait des clients ou non dans votre voiture.

Ailleurs, dans l’industrie, les chauffeurs ne faisaient pas d’argent s’il n’y avait pas de clients. Et, donc, tout le risque était sur leurs épaules. Même chose, dans les faits, pour les chauffeurs d’Uber, qui pouvaient, tout de même, toucher plus d’argent grâce à la modulation des tarifs en fonction de la demande.

Téo Taxi prévoyait que le choix des véhicules électriques allait coûter moins cher que les voitures à essence largement utilisées ailleurs dans l’industrie. En énergie et en coûts d’entretien, Téo évaluait des coûts moins élevés de 12 à 16 %. Et, puisque le modèle s’appuyait sur la récolte de données sur les utilisateurs, à travers ses applications, l’entreprise prévoyait, dans le temps, être plus efficace.

Dans son mémoire de 2014, Téo Taxi explique que 65 % des kilomètres de déplacement des taxis se font à vide, sans aucune facturation, sans client. De plus, les chauffeurs passent 75 % de leur temps à attendre des clients. Grâce aux données et à l’intelligence artificielle, Téo prévoyait une réduction de coûts de 20 % en réduisant ces taux sans facturation et d’attente.

Ainsi, il y a beaucoup de questions sans réponse. Pourquoi le gouvernement n’a-t-il pas accéléré les changements réglementaires pour réussir la modernisation de l’industrie et mettre tout le monde sur un pied d’égalité? Pourquoi les partenaires laissent-ils tomber Téo Taxi en cours de route alors que, dès le départ, nous savions qu’il fallait beaucoup d’argent et de temps? Est-ce que l’étude du modèle d’affaires, dès le départ, a été bien faite?

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