Un richissime Québécois installé aux Bahamas est poursuivi par un syndic de faillite de Montréal qui allègue un transfert frauduleux d’actifs de plusieurs millions de dollars pour éviter de rembourser des créanciers.
C’est le cofondateur du géant Vêtements de sport Gildan, Gregory H. Chamandy, qui est visé par cette poursuite.
Le syndic Litwin Boyadjian affirme que lui et son épouse, la chanteuse Chantal Condoroussis Chamandy, ont soustrait illégalement jusqu’à 8 M$ d’une entreprise québécoise de boissons santé tombée en faillite.
Durant les procédures légales, le couple a quitté le Québec pour aller vivre dans une communauté fermée (gated community en anglais) aux Bahamas, un paradis fiscal reconnu.
L’entreprise en faillite s’appelle Liquid Nutrition Franchising Corporation. Contrôlée par les Chamandy, elle vendait des franchises de magasins Liquid Nutrition.
Encore des magasins
Quelques boutiques Liquid Nutrition sont toujours en activité dans la région de Montréal, mais ils opèrent sous l’égide d’une autre entité. On y vend des boissons santé de type smoothies.
À une époque plus prometteuse, le joueur-vedette de basketball Steve Nash, le quart-arrière Matt Ryan, le hockeyeur Vincent Lecavalier, le receveur Russell Martin et la femme d’affaires Arlene Dickinson (de l’émission Dragon’s Den) faisaient partie des ambassadeurs de Liquid Nutrition au début des années 2010.
« injustement enrichis »
« [Liquid Nutrition Franchising Corporation] a été vidée de ses actifs, au détriment de la masse des créanciers. [...] Chamandy et Chantal [et une entreprise qu’ils contrôlent] se sont injustement enrichis au détriment du débiteur et de la masse des créanciers », allègue le syndic dans une procédure déposée en Cour supérieure en mai.
Le « stratagème » et la « machination » imaginés par le couple visaient à frustrer les créanciers, en « fraude » de leur droit, selon la poursuite.
Dettes de 4,3 M$
Le syndic allègue que « Chamandy et Chantal » ne peuvent plus « invoquer quelque personnalité juridique que ce soit » pour « dissimuler leur fraude et leur abus de droit ».
Liquid s’est placée en mai 2015 sous la protection des tribunaux, déclarant des dettes de 4,3 millions $.
En mai 2017, l’entreprise s’est mise en faillite à la suite du refus de la cour d’approuver une proposition de règlement avec les créanciers.
Des vedettes qui endossaient la compagnie
Steve Nash
- Ex-joueur de basketball
Vincent Lecavalier
- Ex-hockeyeur
Russell Martin
- Joueur de baseball
Des smoothies qui leur ont laissé un goût amer
En plus des recours sur le transfert frauduleux d’actifs, le syndic Liwin Boyadjian a entrepris une autre procédure en septembre contre le couple Chamandy.
Il remet en cause notamment la légalité de remboursements de dépenses pour frais de subsistance de 26 000 $ faits en 2016 à Chantal Condoroussis, alors qu’elle se trouvait... à Beverly Hills, en Californie.
«Ces paiements [...] constituent des traitements préférentiels », affirme le syndic.
Le couple Chamandy n’a pas encore répondu aux recours du syndic. Il a contesté récemment avec succès le fait que des documents judiciaires aient été envoyés par courriel plutôt que par la poste.
Gregory Chamandy n’a pas donné suite à nos demandes d’entrevue et son avocat, Fadi Amine, n’a pas voulu commenter.
« Frappé par une tornade »
Liquid Nutrition n’en est pas à ses premiers démêlés judiciaires. Un créancier a entrepris des recours contre le groupe en Ontario pour 500 000 $.
Dans une requête datée de 2013, deux de ses firmes allèguent s’être fait vendre les droits pour développer des magasins Liquid Nutrition à Ottawa. Tout ça pour ensuite se retrouver sans aucun soutien du franchiseur.
« J’ai été frappé par une tornade. Ces gens très riches tentent de tromper de petits entrepreneurs », nous a confié un créancier, Mark MacDonald, au téléphone.
L’affaire est toujours devant les tribunaux.
Une vie de grand luxe dans le gratin montréalais
Gregory Greg Chamandy a été cofondateur avec son frère Glenn de l’entreprise Vêtements de sport Gildan, dont la capitalisation boursière s’élève aujourd’hui à 8,5 milliards $.
Il a dirigé cette compagnie de 1994 à 2004.
L’entreprise, soutenue alors par le Fonds FTQ et la Caisse de dépôt et placement du Québec, a cependant connu son lot de critiques pour avoir employé des travailleurs de pays très pauvres d’Amérique latine dans le but de fabriquer des chandails revendus à prix d’or.
L’ex-patron de la FTQ Henri Massé avait notamment raconté en 2003 avoir recueilli les aveux de Chamandy, rapportant qu’il aurait congédié des employés en raison d’activités syndicales.
À la même époque, en 2003, Chamandy a fondé une banque privée pour les ultra-riches à la Barbade, un paradis fiscal, du nom d’Oxbridge. C’est un ancien haut gradé de la Banque Royale aux îles Caïmans, Darren Stark, qui la dirige toujours. Il n’a pas répondu à plusieurs messages.
Dans les dernières années, Chamandy a été impliqué dans des minières québécoises, en agissant notamment au conseil de Mines Richmont.
Maison et chalet de luxe
Chamandy a vendu en 2017 à des acheteurs d’origine chinoise une maison d’une valeur de 8,3 M$ à Westmount, décrite comme « la quintessence de l’ultra haut de gamme ».
Elle offre 11 places de stationnement et un parc privé. Elle a huit salles de bain et sept chambres à coucher.
Sa femme Chantal Condoroussis Chamandy possède toujours un immense chalet de 10 M$ à Mont-Tremblant. Il est qualifié d’« ode au luxe et au raffinement », avec des poutres en bois récupéré de la Nouvelle-Angleterre et des pierres de France pour la cave à vin.
Revenu Québec a déposé sur la propriété une hypothèque légale de 1,6 M$, a constaté notre Bureau d’enquête.
Outrage au tribunal
Chamandy s’est retrouvé au cœur d’une chicane de voisins médiatisée en 2013, lors de laquelle il a frôlé la prison. Pendant des années, il a empêché des résidents d’accéder à une plage derrière le chalet de Mont-Tremblant. Il a finalement dû payer une amende de 120 000 $ pour outrage au tribunal.
« Obéir aux ordres de la cour ne semble pas faire partie du code moral de M. Chamandy », l’avait semoncé le juge Mark Schrager avant d’annoncer sa sentence, comme l’avait rapporté Le Journal à l’époque.
https://www.journaldemontreal.com/2019/01/14/lex-patron-de-gildan-et-sa-femme-auraient-siphonne-la-compagnieBagikan Berita Ini
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