L’homme qui a pris part au pire cas de corruption de l’histoire du Canada évite la prison. Le PDG déchu de SNC-Lavalin, Pierre Duhaime, n’aura qu’à passer 20 mois dans sa luxueuse maison de près d’un million $ érigée au bord de l’eau.
En 2012, la Couronne était pourtant convaincue que les crimes de Duhaime étaient si graves qu’elle avait déposé une quinzaine d’accusations, dont celles de complot et de fraude.
Mais le ballon s’est dégonflé puisque seul le chef d’abus de confiance a été maintenu, vendredi, lorsque l’accusé de 65 ans a admis avoir participé au gigantesque scandale de corruption du Centre universitaire de santé McGill (CUSM).
Pour s’assurer de gagner l’appel d’offres pour la construction du mégahôpital d’une valeur de 1,4 milliard $, la firme de génie-conseil SNC-Lavalin avait versé 22,5 millions $ en pots-de-vin aux responsables du CUSM.
Lors de la Commission Charbonneau, cette affaire avait été qualifiée de pire cas de corruption de l’histoire du Canada.
Lors de l’audience de vendredi au palais de justice de Montréal, la Couronne a tenté de justifier pourquoi autant d’accusations étaient finalement tombées.
« De nouveaux éléments ont été obtenus par la poursuite [...], un témoin important a été écarté par le ministère public suite à des faits nouveaux communiqués par la défense », a expliqué la procureure Nathalie Kleber.
Ainsi, officiellement, le rôle de Duhaime n’aura été que d’avoir aidé le directeur adjoint du CUSM, Yanaï Elbaz, dans les jeux d’influence de ce dernier.
« Il a agi par ignorance volontaire dans l’objectif d’aider SNC-Lavalin à obtenir le contrat du CUSM, a précisé son avocat Michel Massicotte. Il n’a bénéficié d’aucune somme d’argent, il n’a pas autorisé ni n’avait connaissance des paiements corruptifs de 22,5 millions $. »
Simple erreur de jugement
Aux yeux de la défense, le crime de Duhaime n’est qu’une « erreur de jugement en omettant de se renseigner davantage », et que cela ne méritait pas d’incarcération.
La Couronne a été du même avis puisqu’elle n’a vu aucun problème à ce que Duhaime purge 20 mois dans sa maison de 3700 pieds carrés.
« Est-ce qu’il y a quelqu’un ici parmi vous qui voudrait être dans les souliers de M. Duhaime ? » a demandé en point de presse le procureur en chef adjoint de la Couronne, Robert Rouleau, en tentant de convaincre de la justesse de la condamnation.
Mais s’il s’agit de prison à domicile, Duhaime aura quand même plusieurs droits de sortie. En fait, il sera confiné chez lui seulement pour six mois, à moins d’une urgence médicale. Il devra ensuite respecter un couvre-feu, ce qui le forcera à dormir chez lui, mais il pourra faire la fête à Noël et au jour de l’An, puisqu’il a obtenu une dispense pour ces nuits-là.
Prison dorée
Pour les sept derniers mois dans sa prison dorée, Duhaime sera libre de ses mouvements, mais il ne pourra pas déménager.
En plus de cette détention à domicile, Duhaime devra effectuer 240 heures de travaux communautaires, et devra verser 200 000 $ au CAVAC sans possibilité d’obtenir de déduction fiscale.
Pour la Couronne, n’importe quel citoyen « qui réfléchit sur les circonstances » du crime ne serait pas choqué qu’une telle sentence ait été suggérée. La preuve, a ajouté Me Rouleau, c’est que la juge Dominique Joly l’a acceptée.
« La suggestion commune proposée par les procureurs apparaît raisonnable et conforme à l’intérêt public », a d’ailleurs dit la magistrate.
Quelques minutes plus tard, Duhaime sortait de la salle d’audience tout sourire. Un peu plus tôt, la Couronne affirmait pourtant que l’accusé ne sortirait pas du palais « en rigolant et en pensant que c’est une bonne journée pour lui ».
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