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Intervention de PKP dans Transat: « Trop peu, trop tard », disent les spécialistes - La Presse

La sortie publique d’hier matin de Pierre Karl Péladeau, qui exhortait les grands actionnaires de Transat à s’opposer à l’offre d’Air Canada à quatre jours de l’assemblée extraordinaire, laisse les experts perplexes.

André Dubuc André Dubuc
La Presse

Ceux-ci trouvent que c’est trop peu, trop tard, et voient mal comment un actionnaire de Transat pourrait être tenté de laisser sur la table l’offre bonifiée d’Air Canada de 18 $ par action sans avoir de garantie en retour.

« Comme dit l’expression : c’est trop peu, trop tard », estime Jacques Roy, professeur en gestion du transport à HEC Montréal. « Les jeux sont faits selon moi, compte tenu de l’offre d’Air Canada, qui a été bonifiée, et des délais. »

« On est peut-être à un stade d’exercice de relations publiques pour le moment », avance de son côté Yan Cimon, professeur de stratégie de l’Université Laval, quand on lui demande le sens à donner à la sortie publique de M. Péladeau.

« Si on avait entre les mains une offre tangible, on pourrait discuter. À ce stade-ci, il faudrait voir si la parole et les dollars sont alignés. »

Yan Cimon

Par communiqué, M. Péladeau a annoncé détenir 600 000 actions de Transat, soit 1,6 % des actions en circulation. À titre d’actionnaire, il votera contre l’offre d’Air Canada parce qu’« elle va à l’encontre des intérêts fondamentaux de l’entreprise, de ses employés, des consommateurs et de l’économie du Québec », explique l’homme d’affaires.

Pour ces mêmes raisons, le chef de la direction de Québecor presse les grands actionnaires de Transat, soit les gestionnaires de fonds Letko Brosseau, le Fonds de solidarité FTQ et la Caisse de dépôt et placement du Québec, de voter contre la proposition lors de l’assemblée devant se tenir le 23 août, à Montréal. Or, Air Canada a déjà indiqué que Letko Brosseau allait déposer ses actions.

Le transporteur a d’ailleurs réagi hier soir.

« Contrairement à ce qu'affirme M. Péladeau, qui a lui-même tenté de structurer une offre sans succès, la transaction avec Air Canada est avantageuse et dans le meilleur intérêt non seulement des deux entreprises, mais aussi de leurs employés, des consommateurs québécois et de l'économie du Québec », a répliqué Air Canada à l’homme d’affaires, dans un communiqué.

L’entreprise n’a également pas manqué de souligner tous les appuis qu’elle a reçus en vue de cette transaction, parmi lesquels on compte le syndicat UNIFOR, l'ALPA, qui représente les pilotes de Transat, la Fédération des chambres de commerce du Québec, Tourisme Montréal, Aéroports de Montréal, la Chambre de commerce du Montréal métropolitain et le Conseil du patronat.

« Assez particulier »

« Sans doute que l’objectif de M. Péladeau est de faire dérailler le processus », répond Louis Hébert, professeur au département de management à HEC Montréal, quand on le questionne sur la stratégie poursuivie. « Si M. Péladeau atteint son objectif, ce ne serait pas sans conséquence pour Air Transat, qui devra payer une lourde pénalité », fait valoir le professeur Hébert.

« Ce qui me surprend le plus, poursuit-il, c’est que différents intervenants font des promesses sans faire de proposition formelle. Si quelqu’un veut faire une offre, qu’il la fasse. Dans le cas de Transat, les gens vont sur la place publique avant de faire une offre, plutôt que le contraire. C’est assez particulier. »

M. Péladeau a dit hier travailler à l’élaboration d’une offre potentielle avec des partenaires établis et de renommée internationale, sans les nommer. Un article de La Presse du 13 août révélait que M. Péladeau discutait avec WestJet et Air France-KLM. Le chef de la direction de Québecor a expliqué hier ne pas pouvoir faire d’offre ferme faute d’avoir accès aux informations non publiques de Transat.

Avant M. Péladeau, Groupe Mach, dirigé par Vincent Chiara, avait présenté une offre conditionnelle à 14 $ par action, qui avait été rejetée par le conseil d’administration de Transat.

Mehran Ebrahimi, professeur à l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal, est favorable à l’offre d’Air Canada, entreprise canadienne qui a une expertise dans le domaine du voyage d’agrément et qui a pris l’engagement de maintenir le siège social de Transat à Montréal, souligne-t-il. À moyen terme, le spécialiste du transport aérien s’attend d’ailleurs à une lutte sans merci entre un éventuel Air Canada-Transat d’un côté, et WestJet, de l’autre, pour gagner les voyageurs canadiens.

« Je pense que l’offre d’Air Canada va l’emporter, dit M. Ebrahimi. À mon avis, M. Péladeau a fait des efforts et des contacts pour arriver avec une simili-entente afin de mettre ça sur la place publique dans le but de fragiliser l’offre déjà sur la table. Il n’y est pas parvenu. Il essaie maintenant de fragiliser l’offre d’Air Canada dans l’opinion publique. »

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