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Des maisons sur d'anciens dépotoirs

TROIS-RIVIÈRES — Votre maison a-t-elle été bâtie sur un site qui serait potentiellement contaminé? C’est la question que Marie-Claude Génie souhaite que les Québécois se posent, après avoir répertorié des milliers de sites contaminés un peu partout au Québec, dont plusieurs dizaines aux quatre coins de la Mauricie et du Centre-du-Québec. L’ancienne avocate et courtière immobilière espère maintenant changer les réflexes auprès des courtiers immobiliers et des acheteurs qui magasinent une maison.

«Je souhaite changer nos mœurs. C’est bien de procéder à l’inspection de la maison, mais il faut aussi poser des questions sur le terrain. Il y a de plus en plus de propriétaires au Québec qui perdent leur investissement parce que leur maison se retrouve sur un site contaminé», constate-t-elle. Un outil qu’elle vient de mettre en place sur le web, immoproof.ca, répertorie l’ensemble des sites contaminés par le biais de sept bases de données, tant au provincial, au fédéral qu’à l’Office national de l’énergie, la Régie du bâtiment du Québec et la Ville de Montréal, et permet aux futurs acheteurs ou propriétaires actuels un premier diagnostic de leur terrain dans un rayon de 200 mètres de la résidence.

Selon elle, trois problèmes majeurs peuvent survenir si une construction se retrouve sur un site potentiellement contaminé. Le premier est la contamination pure et simple du terrain lorsque la maison est construite sur un terrain contenant des hydrocarbures ou des matériaux lourds. Le second est lié à l’émanation de biogaz, qui sont généralement inodores mais peuvent avoir des risques importants sur la santé. Finalement, le troisième est la capacité portante du sol, dans les cas par exemple de construction sur des sites d’anciens dépotoirs, ce qui pourrait avoir une incidence sur la structure même de la maison.

L’outil mis en place permet également de connaître les endroits où il aurait pu y avoir des fuites de pipelines. «Notre outil se veut un premier diagnostic. Il ne remplacera jamais un carottage du sol. Nous sommes en amont de ça, nous visons à lever des drapeaux rouges pour inciter les gens à pousser plus loin, parce que parfois, les transactions se font rapidement», constate Mme Génie.

Anciens dépotoirs
À la Ville de Trois-Rivières, on indique avoir répertorié douze anciens sites contaminés sur le territoire, dont sept ont pu être délimités de façon plus précise. Pour la majeure partie, il s’agit d’anciens dépotoirs ou d’anciens sites d’entreposage de matériaux secs. De ce nombre, quatre de ces sites ont depuis été autorisés pour la construction, où l’on retrouve aujourd’hui des résidences privées, des commerces et même une école.

Cette carte montre les différents terrains identifiés par la Ville de Trois-Rivières. Ceux marqués d’un astérisque sont des sites dont on ne connaît pas la délimitation exacte ou encore ce qu’ils ont pu contenir.

«Il faut comprendre que la construction a été autorisée en conformité avec la loi provinciale des différentes époques», explique Yvan Toutant, porte-parole au cabinet du maire de Trois-Rivières. L’un de ces sites, délimité par les boulevards des Forges, des Récollets, du Chanoine-Moreau et Place de la Fontaine, a reçu l’aval pour la construction au milieu des années 40. Il s’agit d’un site où se situait un ancien dépotoir, remontant avant les années 30, rappelle-t-on.

«La Ville a toujours accordé des permis en relation avec la loi existante lors de l’émission du permis de construction. En aucun temps, il n’existe aucun document qui démontre l’existence d’un risque pour la santé», mentionne Yvan Toutant, qui insiste par ailleurs pour rappeler que la Ville ne peut pas effectuer de tests sur des terrains privés.

En 2006, un propriétaire d’un terrain bordant le boulevard des Chenaux, là où un ancien dépotoir a déjà été exploité mais dont on ignore la délimitation précise, avait demandé une expertise pour connaître le taux de biogaz s’échappant du sol. «Le résultat s’est avéré à la limite du détectable tellement le niveau était faible», raconte Yvan Toutant.

À la Ville de Shawinigan, on a aussi répertorié les sites contaminés, en partageant l’information disponible avec le ministère de l’Environnement. Difficile de se prononcer pour ce qui a pu se produire il y a 50 ou 60 ans, mais la porte-parole de la Ville, Véronique Gagnon-Piquès, assure qu’au cours des dix dernières années, la Ville n’a procédé à aucune vente de terrain contaminé sans qu’il soit au préalable décontaminé au niveau exigé par la loi en lien avec la construction qui devait s’y réaliser.

Caractérisation
Pour Diane Saint-Laurent, géographe et professeure au Département des sciences de l’environnement de l’UQTR, on ne peut juger objectivement d’un site avant d’en avoir fait une caractérisation complète et d’en avoir étudié l’historique. «Il faut procéder à une analyse approfondie avant de pouvoir tirer des conclusions. La première étape, c’est de procéder à la caractérisation. Il faut savoir exactement ce qu’il y a dans le sol. On peut indiquer qu’il s’agit d’un ancien site d’entreposage de matériaux secs, mais s’il y a eu de l’enfouissement illégal à l’époque, ça n’apparaîtra pas dans les documents officiels. Ensuite, on étudie l’historique du terrain, souvent avec des photos aériennes aux différentes époques, pour voir l’évolution du site», indique-t-elle, rappelant que sans ces vérifications, il devient difficile d’évaluer les risques réels pour la santé ou encore pour la capacité portante du sol.

Celle qui a œuvré dix ans en caractérisation des sols dans l’entreprise privée reconnaît toutefois que c’est un réel problème qui peut survenir au moment d’une transaction immobilière. «Parfois, l’information ne se transmet pas même si elle est disponible, que ce soit de façon volontaire ou involontaire. Après quelques années, les recours des propriétaires peuvent être assez limités», mentionne-t-elle, indiquant que la caractérisation d’un sol peut vouloir dire une dépense de quelques milliers de dollars pour un propriétaire, mais qu’elle permet parfois de sauver son investissement immobilier.

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